Que sait-on de la mort?
La peur ne serait-elle pas due à notre ignorance?
Si nous souhaitons nous débarasser de la peur de la mort, pourquoi ne pas nous adresser à un philosophe qui, lui, n'en avait pas peur : Socrate.
Il aborde ce sujet à plusieurs reprises, notamment alors qu'il vient d'être condamné à mort :
Socrate dans l'Apologie a écrit :Je veux vous raconter, une chose qui m'est arrivée aujourd'hui, et vous apprendre ce qu'elle signifie. [...] Il m'est arrivé aujourd'hui quelque chose d'extraordinaire. Cette inspiration prophétique qui n'a cessé de se faire entendre à moi dans tout le cours de ma vie, qui dans les moindres occasions n'a jamais manqué de me détourner de tout ce que j'allais faire de mal, aujourd'hui qu'il m'arrive ce que vous voyez, ce qu'on pourrait prendre, et ce qu'on prend en effet pour le plus grand de tous les maux, cette voix divine a gardé le silence; elle ne m'a arrêté ni ce matin quand je suis sorti de ma maison, ni quand je suis venu devant ce tribunal, ni tandis que je parlais, quand j'allais dire quelque chose.
Socrates prétendait recevoir une inspiration, mais cette inspiration qui l'a toujours averti avant qu'il fasse quelque chose de mal, ne l'a pas retenu d'accepter la sentance des juges (que par aileurs, il pouvait aisément éviter en leur mentant un peu, mais il a préféré ne pas mentir...)
Socrate dans L'Apologie a écrit :[28b] Mais quelqu'un me dira peut-être : N'as-tu pas honte, Socrate, de t'être attaché à une étude qui te met présentement en danger de mourir?
Je puis répondre avec raison à qui me ferait cette objection : Vous êtes dans l’erreur, si vous croyez qu'un homme, qui vaut quelque chose, doit, considérer les chances de la mort ou de la vie, au lieu de chercher seulement, dans toutes ses démarches, si ce qu'il fait est juste ou injuste, et si c'est l'action d'un homme de bien ou d'un méchant. Ce seraient donc, suivant vous, des insensés que tous ces demi-dieux qui moururent au siège de Troie, et particulièrement le fils
[28c] de Thétis, qui comptait le danger pour si peu de chose, en comparaison de la honte, que la déesse sa mère, qui le voyait dans l'impatience d'aller tuer Hector, lui ayant parlé à peu près en ces termes, si je m'en souviens mon fils, si tu venges la mort de Patrocle, ton ami, en tuant Hector, tu mourras; car
Ton trépas doit suivre celui d'Hector;
lui, méprisant le péril et la mort, et
[28d] craignant beaucoup plus de vivre comme un lâche, sans venger ses amis :
Que je meure à l'instant,
s'écrie-t-il, pourvu que je punisse le meurtrier de Patrocle, et que je ne reste pas ici exposé au mépris,
Assis sur mes vaisseaux, fardeau inutile de la terre.
Est-ce là s'inquiéter du danger et de la mort?
Et en effet, Athéniens, c'est ainsi qu'il en doit être. Tout homme qui a choisi un poste, parce qu'il le jugeait le plus honorable, ou qui y a été placé par son chef, doit, à mon avis, y demeurer ferme, et ne considérer ni la mort, ni le péril, ni rien autre chose que l'honneur. Ce serait donc de ma part une étrange conduite,
Athéniens, si, après avoir gardé fidèlement, comme un brave soldat, tous les postes où j'ai
[28e] été mis par vos généraux, à Potidée, à Amphipolis et à Délium, et, après avoir souvent exposé ma vie, aujourd'hui que le dieu de Delphes m'ordonne, à ce que je crois, et comme je l'interprète moi-même, de passer mes jours dans l'étude de la philosophie, en m'examinant moi-même, et en examinant les autres, la peur de
[29a] la mort, ou quelque autre danger, me faisait abandonner ce poste. Ce serait là une conduite bien étrange, et c'est alors vraiment qu'il faudrait me citer devant ce tribunal comme un impie qui ne reconnaît point de dieux, qui désobéit à l'oracle, qui craint la mort, qui se croit sage, et qui ne l'est pas; car craindre la mort, Athéniens, ce n'est autre chose que se croire sage sans l'être, car c'est croire connaître ce que l'on ne connaît point. En effet, personne ne connaît ce que c'est que la mort, et si elle n'est pas le plus grand de tous les biens pour l'homme.
Plus tard, il ajoute :
[30c] Soyez persuadés que si vous me faites mourir, étant tel que je viens de le déclarer, vous vous ferez plus de mal qu'à moi. En effet, ni Anytus ni Mélitus [les plaignants qui ont demandé la condamnation à mort NdB] ne me feront aucun mal ;
[30d] ils ne le peuvent, car je ne crois pas qu'il soit au pouvoir du méchant de nuire à l’homme de bien. Peut-être me feront-ils condamner à la mort ou à l'exil ou à la perte de mes droits de citoyen, et Anytus et les autres prennent sans doute cela pour de très grands maux; mais moi je ne suis pas de leur avis; à mon sens, le plus grand-de tous les maux, c'est ce qu'Anytus fait aujourd'hui, d'entreprendre de faire périr un innocent.
Bon il me faut arrêter là les longues citations. Platon laisse Socrate expliquer cette tranquillité devant la mort dans divers livres :
- L'Apologie de Socrate
http://jydupuis.apinc.org/Philosophie/P ... ologie.pdf /
http://philoctetes.free.fr/apologiedesocrate.htm- Criton
http://jydupuis.apinc.org/Philosophie/Platon-Criton.pdf /
http://philoctetes.free.fr/critonplaton.htm- Phédon (je n'ai pas trouvé le texte, lien wiki...
http://fr.wikipedia.org/wiki/Ph%C3%A9don_(Platon) )
Prends la peine de les lire, ces passages devraient pouvoir t'éclairer un peu!
A peu près tous les grands philosophes ont développé ce thème, tu n'auras pas de mal à trouver d'autres sources qui en parlent avec des considérations similaires.
On pourra aussi aborder le sujet de la mort sous l'angle mystique et initiatique si tu le souhaites, par exemple ce qu'en disent les yogi qui ont su décrire ce qui se passe à ce moment là, ou par l'intermédiaire des témoignages de NDE qui décrivent une félicité infinie. C'est par ailleurs un thème un peu récurent qui revient de temps en temps sur notre forum, et d'autres sujets en parlent plus ou moins directement. C'est que la mort est un sujet qui pousse à une réflexion spirituelle!
On a demandé au Dalaï Lama
« Qu’est ce qui vous surprend le plus dans l’humanité ? »
Il a répondu :
« Les hommes…
Parce qu’ils perdent la santé pour accumuler de l’argent,
ensuite ils perdent de l’argent pour retrouver la santé
Et à penser anxieusement au futur, ils oublient le présent
de telle sorte qu’ils finissent par ne vivre ni le présent ni le futur.
Ils vivent comme si ils n’allaient jamais mourir…
et meurent comme si ils n’avaient jamais vécu… »
NB : j'ai déplacé ce sujet pour en faire un fil de discussion à part entière. Notez que j'ai choisi de parler dans le titre du côté effrayant pour que la question apparaisse. Il me faut tout de même du coup préciser que nombre de médiums ayant ces dons à divers degrès ont réussi à vivre tout à fait en paix avec ces manifestations. Le titre ne doit pas laisser croire que la mort est forcément effrayante, et le développement consiste justement à trouver comment elle peut ne pas l'être ;)
La mort est-elle effrayante en soi? Nous savons déjà que c'est plutôt l'inconnu qui effraie. Or il y a tant de choses que nous ne connaissons pas, mais qui ne nous effrayent pas, parce que nous ne nous interrongeons pas sur elles.
Quelles sont les expériences de l'armée chinoise dans le domaine des armes bactériologiques? On ne se pose jamais la question, alors cela ne fait pas peur. Sortez la nuit dans la campagne et marchez droit devant vous : vous n'aurez pas peur. Commencez à essayer de distinguer les choses qui font du bruit, vous verrez des ombres, des formes etc., et vous commencerez à flipper de plus en plus. Cultivez ce beoin impérieux de tout savoir et de tout contrôler et cette sortie nocturne tournera au cauchemar.
Le peur ne viendrait-elle pas tout simplement du désir insatisfait de savoir? Lorsque notre intellect est pris en défaut, il s'établit une souffrance d'un type particulier : la peur.
Revenons à notre balade nocturne en forêt : dès qu'on se concentre sur ces bruits ou ces ombres qu'on ne comprend pas, on a peur. On peut éclairer ces choses suspectes avec une lampe de poche, et se rassurer en constatant qu'il s'agissait de feuilles mortes qui battaient au vent. Mais peut-on éclairer toute la forêt? Il y aura toujours un inconnu et même des tas d'incconus qui nous feront peur.
Ainsi il n'est possible de calmer la peur par l'éclairage et la compréhension de son objet, que de façon très provisoire. Ne plus avoir peur implique de lutter contre la cause de la peur qui n'est pas les feuilles battant au vent, mais notre désir de savoir. Eteignez-le et vous traverserez la forêt sans peur.
Eliminez ce désir de savoir, et considérez à nouveau la mort. Voyez alors si elle vous fait toujours peur.