Bertrand a écrit :Odin : "Je crois que beaucoup se reconnaîtrons dans cette phrase."
C'est certain, Odin. Ceux qui ont la chance d'avoir été mis à part étant enfants ou adolescents en tirent de grands bénéfices, car cela leur évite de plonger dans les valeurs vulgaires.
Le temps et l'énergie qu'on ne perd pas à jouer au foot et à draguer est toujours fortement valorisé chez ces individus-là, et plus tard, comme le dit Schaemann, ce sont ceux-là qu'on vient voir pour avoir des conseils.
--> "Elle a toujours été rêveuse, solitaire, considérée comme différente et bizarre par les autres."
Bien entendu et probablement comme la grande majorité d'entre vous, je me retrouve entièrement dans cette description. J'ai moi-même très longtemps été rêveuse et solitaire, mise à l'écart par les autres pour cause de bizarrerie ; et je le suis toujours.
Je dois dire que, la plupart du temps, j'en suis heureuse. Lorsque j'entends mes collègues (des femmes de trente ans !) discuter du dernier épisode de Secret Story, débattre de qui de Kévin, de Machine ou de Truc est le plus c**, le plus intéressant, le plus beau, je me demande vraiment ce que je fais là. Et être mise à l'écart par ce genre de personnes sous prétexte que (quoi, comment ??) j'ignore que la Star Academy est terminé depuis des mois, hé bien, je dois dire que cela me soulage plus qu'autre chose...
Être considérée comme étrange et marginale, être ignorée par des gens qui basent leur système de valeurs sur le ramassis de c***eries qu'elles ingurgitent à longueur de temps devant leur télé, cela ne m'empêche pas de dormir, loin de là.
Ce que je ne comprends pas, c'est l'hostilité que cela engendre parfois à mon égard. Je suis une personne gentille, cultivée, mignonne, douce et patiente, je suis de bonne volonté et ne cherche qu'à progresser dans mon travail quand bien même il ne s'agit que d'un job étudiant, je suis souriante et aimable avec les clients même quand ils sont odieux, je m'intéresse aux personnes autour de moi autant que je le peux (et autant que notre peu de points communs me le permette) mais cela ne m'empêche pas de m'attirer la méchanceté de certaines de mes collègues.
L'une d'entre elles en particulier parait me détester depuis mon premier jour, et multiplie actes de mesquinerie et vannes à mes dépends. Lorsque j'arrive le matin, hop ! elle me jette un oeil et glisse un mot aux autres vendeuses, qui gloussent entre elles en pensant que je suis non seulement sourde et aveugle, mais aussi passablement stupide.
Je dois supporter ce genre de choses depuis un mois environ, parce que je suis différente d'elles. Il paraît que je suis froide et lointaine, que je suis hautaine et distante. C'est bien possible ; mais pourquoi voudrais-je me rapprocher de telles personnes, qui disent du mal de moi sans me connaître, et me sourient avec hypocrisie lorsque cela les arrange ?
Je n'aime pas l'hypocrisie, je n'aime pas la méchanceté, et à dire vrai, j'apprécie encore moins la stupidité et la paresse intellectuelle. Si elles sont aigries de n'être devenues "que" des vendeuses en boulangerie, que ce qu'elles sont réussi à accomplir de leurs vies se résument à faire des sandwiches, emballer des gâteaux et faire du café à de parfaits inconnus, ce n'est pas de ma faute ; tout le monde n'a pas la chance d'avoir des parents capables de payer pour les études de leurs enfants, mais les prêts étudiants, cela n'existe pas pour rien.
Je me suis exilée à 1000 km de chez moi pour mes études. Faute d'avoir la nationalité belge, je suis contrainte d'attendre trois ans avant de pouvoir entamer mes études de vétérinaire ; j'ai déjà 23 ans, ce que signifie que dans le meilleur des cas, je ne serai pas diplômée avant mes 30 ans. Tout le monde autour de moi n'arrête pas de me dire à quel point je suis brave et courageuse d'être partie si loin, dans un pays, une ville où je ne connais personne ; mais non ! Je me donne simplement la peine d'obtenir ce que je veux. En quoi est-ce courageux ? C'est simplement réaliste : on n'a rien sans rien, dans la vie.
Une jeune étudiante, française comme moi mais âgée de 19 ans, m'a expliqué rêver de devenir vétérinaire depuis qu'elle est toute petite, comme moi ; elle a pourtant abandonné et est repartie chez elle en Alsace à la moitié de l'année. Pourquoi ? Parce que repartir pour 6 ans d'études supplémentaires lui semblait trop long, trop pénible. Elle sentait qu'elle n'en aurait pas la patience. Là-dessus, elle-aussi de me dire combien elle admirait mon courage et ma patience ! MAIS NON ! Persévérance et volonté, je veux bien ; mais le courage ? ça veut dire quoi, ça ?
Tout ça pour dire que je ne comprends pas les gens autour de moi, que je ne les ai jamais compris et ne les comprendrai sans doute jamais. Depuis que je suis gamine, je me suis toujours intéressée à plein de choses ; à 6 ans, quand les autres enfants sortaient à la récré pour jouer au chat et à la corde à sauter, moi je restais en classe et écrivais des exposés sur les hommes de néanderthal et sur le systèmes solaires, sur les fourmis et sur quantités d'autres choses, je restais toute seule dans mon coin à lire sciences et vie et trucs dans le genre. Pas parce que mon professeur me le demandait, mais parce que ça m'intéressait, tout simplement.
J'aurai adoré vivre en ermite dans une caverne au fond d'une forêt, ou sur une île déserte ; j'en parlais souvent pour plaisanter - mais je ne plaisantais qu'à moitié. Le fait est que si je devais me retrouver toute seule sur une île déserte, la compagnie des autres ne me manquerait pas. Je n'en ai jamais rien retiré de bon, en quoi pourrait-elle me manquer ? Le seul être dont la présence me ferait défaut serait celle de mon chat. Lui ne me juge pas, lui m'aime pour ce que je suis, pour ce que je lui apporte.
Lorsque je vois les autres autour de moi, qui passent leurs soirées à regarder des émissions de téléréalités minables, à ingurgiter de l'alcool, rentrer à 5 heures du matin sous prétexte qu'ils sont jeunes et que c'est ce que la société attend d'eux, au lieu de chercher à s'instruire, à s'élever, ou tout simplement à admirer la beauté du monde, je me demande vraiment ce que je fais ici, au milieu d'eux, je me demande vraiment ce que l'on attend de moi...
Au cours de ce dernier mois, mon unique rayon de soleil a été un client (lequel s'est révélé être un médium-parapsychologue - il a tenu à me montrer sa carte, à moi, parmis toutes les autres vendeuses présentes ce jour-là) qui, parce que j'ai tenu à lui échanger son sandwich raté contre un autre, m'a dit que s'il y avait plus de gens comme moi, souriants, zens et charmants, il y aurait peut-être moins de guerres dans ce monde....
Enfin bref, j'arrête là de raconter ma vie, il faut que je me prépare pour aller travailler... Ce midi jusqu'à la fermeture, je bosse avec la charmante vendeuse qui ne me supporte pas... Tout un programme... Je m'en réjouis d'avance.
Je complèterai ce message plus tard, à bientôt... :/