Carlos Castañeda et Michael Harner, comparaison entre deux "visionnaires"

En 1960, Carlos Castañeda, jeune anthropologue de l'Université de Californie à Los Angeles (UCLA), entreprend de collecter des données sur l'usage des plantes médicinales en Arizona. Il rencontre Juan Matus, un Indien yaqui de près de 70 ans, dont il devient, six années durant, l'apprenti. Il expérimente durant toute cette période l'usage d'herbes et de champignons hallucinogènes, pratique divers actes de sorcellerie et de divination, s'entretient longuement avec le vieil Indien et atteint divers "états de conscience non ordinaire".

Herbe du Diable

Castañeda va tirer de cette immersion culturelle sa thèse de doctorat en anthropologie (L'Herbe du Diable et la petite fumée, une voie Yaqui de la connaissance, Paris, Soleil Noir, 1975) La subjectivité assumée du chercheur et son observation participante vont susciter dans les milieux académiques de nombreux débats, quand bien même Castañeda a posé des questions nouvelles et utiles en sciences sociales.

Après quoi, Castañeda publie plusieurs volumes (de Voir: Les enseignements d'un sorcier yaqui [1971 en anglais, 1973 en français chez Galllimard/NRF] jusqu'à La force du silence [1977/NRF 1978]), en passant par Le voyage à Ixtlan, Histoires de pouvoir, Le second anneau de pouvoir, Le Don de l'Aigle et Le feu du dedans ] dans lesquels il évoque douze années de ses relations avec Don Juan. Ces ouvrages furent de véritables best-sellers littéraires et déclenchèrent, dans la mouvance de la contre-culture, un véritable culte de Castañeda, dont le principal intéressé joue en entretenant autour de lui un mystère savamment dosé.

Recettes ou initiation?

L'expérience chamanique de Michael Harner peut être comparée à celle de Castañeda. Tous deux affirment avoir exploré des champs de la réalité non ordinaire tels que le font depuis des millénaires les chamanes, et concluent que la "réalité de consensus" n'est qu'un petit segment (occidental) du spectre de ce que l'homme (universel) peut percevoir du réel. Si les deux anthropologues ont vulgarisé le chamanisme, leurs démarches diffèrent toutefois: Michael Harner a développé une méthode permettant à chacun de s'exercer à des techniques chamaniques d'altération de la conscience [The Foundation for Shamanic Studies, P.O. Pox 1939, Mill Valley, California 94942; sur Internet: http://www.shamanism.org ], au risque de développer des espèces de "recettes" chamaniques, tandis que Castañeda continue de distiller par écrit les enseignements d'un vieil indien Yaqui, Don Juan, un véritable gourou.

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